Une toute autre image s’offre aux passants une fois à l’intérieur de l’îlot. L’arrière-cour donne à voir un espace extérieur investi par les habitants et une composition spatiale faite de bric et de broc. L’impasse est envahie par la voiture : que ce soit dans les garages ou le long de l’impasse sous la forme d’un stationnement sauvage.
Trois types d’espace sont recensés comme des prolongements du chez soi. Tout d’abord, il existe des jardins privés dont la végétation est variée et incontrôlée. Les barrières et les garages qui les ceinturent les protègent du regard extérieur depuis l’impasse. Ensuite, certaines façades sont ponctuées d’accroches telles que des balcons, terrasses et appentis. Des chaises, des tables et du linge y sont entreposés. Enfin, les garages construits en fond de parcelles possèdent les traces d’une domesticité. En effet, ces constructions de plain-pied ne servent pas qu’au stationnement des voitures mais sont pour la plupart transformés en atelier de bricolage, ou en lieu de stockage. L’aspect des bâtiments donne l’impression qu’ils ont été bricolés, rajoutés au fil du temps, en suivant plus ou moins un alignement sur l’impasse. La voie d’accès présente également des aspérités, des creux qui suggère le passage régulier de camions et donc d’une activité artisanale.
C’est en ce coeur d’îlot que des rencontres informelles s’effectuent avec les habitants. Au premier abord, les habitants me saluent. Mais ils comprennent rapidement que je ne suis pas d’ici. Mon regard inquisiteur et curieux les inquiète. Alors ils me demandent tous : ‘‘Que faites-vous ici ?’’. Cette question est une manière de me signifier que ma présence n’est pas légitime. Pourtant, depuis l’extérieur rien ne laisse présager que ce cheminement est une impasse et qu’elle est privée. Je leur réponds de manière inoffensive: ‘‘Il n’y a pas de barrière’’. Cette situation montre le statut particulier de cet espace ‘‘intermédiaire’’: d’usage privé, mais accessible et visible par le public.
