Quartier du Dolmen: L’ancien travailleur des chantiers navals

“La maison date de 1955, 1958, comme une grande partie des maisons aux alentours. Ça a été fait selon les critères de l’époque, la porte d’entrée est sur le côté. C’est conçu à la Nantaise. C’est-à-dire que tout l’ensemble fonctionnel, la buanderie, le garage sont en bas, et les pièces de vie sont en haut. Il y a quelque chose de plutôt agréable, c’est au niveau de l’intérieur. Vous voyez, ça fait un genre de rectangle, et puis à l’intérieur, des jardins donc. Le pâté de maisons à côté est construit de la même manière. En face, ça a été construit un peu n’importe comment, il y a des façons de faire… Par exemple, j’ai un voisinage qui est très tranquille donc ça va, mais j’ai des vis-à-vis qui sont juste en face quoi. Après on me dit “bah oui mais tu es en ville”, mais bon c’est quand même une rue qui est large quoi. ”

“Là où sont les immeubles, c’était un parc, un jardin en fait. Après c’est devenu la caserne des pompiers, avec des logements exigus. Parce que quand je suis arrivé à la fin 1995, il y avait des grèves, des banderoles disant que les logements des pompiers étaient trop petits. Et en 1997, ça a été laissé, et ils ont commencé à faire les travaux fin 2010. Et niveau vie de quartier, il n’y a rien, c’est clair. Avant il y avait davantage de vie de quartier quand il y avait les pompiers. Parce qu’on les voyait, quand ils étaient dans leur salle de repos, et des fois il y avait des animations. Par exemple une fois, c’était une personne qui jouait de l’accordéon. Et même aussi au niveau des gens qui y vivaient, j’ai connu des gens qui ont fait les deux, la caserne d’ici et la caserne en périphérie, ils préféraient la caserne d’ici à la caserne en périphérie. Parce qu’il y a moins de contacts entre les gens.”

“Il y avait les ateliers municipaux, qui devaient dater aussi des années 1950. C’était un garage pour la réparation des véhicules de la mairie. Ça a été détruit pour faire place à des constructions… avec la question de la dépollution, et puis aussi avec les contestations du voisinage, qui pouvait avoir peur qu’ils fassent des bâtiments très hauts. Ils avaient l’idée de mettre un immeuble de 4 étages. Et il y a un truc cynique en fait, “vous aurez du soleil en été seulement deux heures par jour”. Bon bah les gens ont dit ça va quoi, nous ça nous énerve. C’est un peu un bras de fer.”

“La maison avec la façade rose est une maison un peu plus ancienne. Un peu plus haut, c’est des maisons qui doivent dater du début du XXème siècle, ou années 1920, par là. Ce sont des maisons qui n’ont pas été détruites. Une grande partie de la rue en 1943… c’était complètement… Il n’y avait plus rien quoi“

“Il y a un endroit, avec la reconstruction, où ils ont trouvé… alors ils ne savent pas si c’est une nécropole, ou si c’était une ville, mais ils ont trouvé des ossements, des poteries, différents objets. Mais bon, est-ce que c’était par manque d’intérêt, ou parce que les recherches archéologiques ça peut tout de suite bloquer plusieurs mois, voire un an ou deux, mais ils ont tout comblé pour construire. “

“ Les couleurs, je pense que ça a peut-être attrait avec une bande dessinée, qui s’appelle Tintin. C’est curieux ce vis-à-vis quand même. Et puis là ça fait à peine dix ans”

“Je vais rarement à l’Agora. Ça date du milieu des années 2000, parce qu’avant il y avait la maison du peuple.
Ils ont des cours de langue, d’anglais, de russe. Mais actuellement je suis en contact avec une association sur Nantes, où j’apprends une autre langue du groupe slave, le Tchèque.”

“Cargill… ça ce n’est pas acceptable… Le problème c’est que ce n’est pas loin des habitations.”

“Il y a juste 30 ans, j’avais un fourgon et je faisais des livraisons. C’était un boulot à la con, pour différentes raisons. On pouvait entrer ici, on montrait une pièce d’identité, et si on passait le lendemain on n’avait même pas besoin de montrer une pièce d’identité. Tandis que maintenant c’est une véritable procédure : il faut montrer la pièce d’identité à chaque fois, ensuite il y a un formulaire à remplir… après il faut avoir un casque de sécurité, des gants, des chaussures… J’exagère peut-être un peu, mais pas beaucoup. Mais bon ce n’est peut-être pas complètement anormal parce que, quand je suis rentré dans le terminal gazier en 1989, je n’ai pas le souvenir de quelque chose de très strict ; même dans la raffinerie, c’était pas très strict”

“il y a une bonne partie de travailleurs étrangers : Europe centrale, et puis ensuite il y aussi quelques Ukrainiens, des Russes… Il y a même aussi eu des Indiens. Il y a eu des gens qui ont eu de gros problèmes pour se faire payer. Notamment il y a eu des Polonais, qui n’étaient pas payés depuis, je ne sais pas, plusieurs semaines. Ils ont décidé d’arrêter le travail, ils ont commencé à faire une grève de la faim, et pendant ce temps-là, l’entreprise a subtilisé un des fourgons de transport. La conséquence c’est que les types risquaient de se retrouver totalement isolés, et obligés de rentrer par leur propre moyen. Ils n’ont pas été jusqu’au bout parce que la population, le syndicat, la CGT des chantiers de l’Atlantique, en plus des gens de Saint-Nazaire aussi, sont venus les aider et après il y a eu une assistance juridique, et ils ont pu rentrer quoi. C’était en 2005.”

“J’ai arrêté de travailler il y a deux ans. Parce qu’il y avait l’amiante, mais il y avait autre chose avant. C’est-à-dire qu’au lieu d’arrêter de travailler à 62 ou 63 ans, j’ai arrêté à 55. L’amiante c’est devenu dangereux seulement en 1997. Avant ça n’était pas dangereux. J’avais travaillé dans un garage, les gens soufflaient les plaquettes de freins, et puis les respiraient… Personnellement, j’ai très peu perdu, parce que nous avons des avantages qui sont complètement invraisemblables. Quand je suis arrivé dans cette entreprise-là, ça fait tout juste 25 ans, j’ai eu l’impression d’être arrivé dans un pays étranger. Parce que les salaires étaient beaucoup plus importants, parce qu’on n’était pas soumis à une pression pour travailler plus vite. Et puis plus ça allait, et plus j’ai vu des gens qui ne faisaient pas grand-chose.”

“Avant la mondialisation, il ne devait y avoir que deux portiques, maintenant il y en a cinq. Après, c’est un endroit, ça incite au voyage… C’est une ouverture sur le monde”

“Ça correspond à un des premiers bassins, qui doit remonter à peu près à 1855. Ça s’appelle une forme, c’est un peu comme un garage. Un garage où le bateau est soit construit soit réparé. Le pavage est d’origine. Ça a été construit sous l’impulsion de Napoléon Ier, puis ensuite sous Napoléon III. Certains bassins doivent dater de la fin du XIXème. C’est quasiment fait à la pelle et à la pioche quoi… Et puis en plus ils n’ont pas forcément fait ça en beaucoup de temps. Maintenant ça n’est plus l’endroit où on reçoit des bateaux, c’est plutôt pour la réparation. Parce qu’au niveau du port, ça a été décalé dans les années 1980 de Saint-Nazaire à Montoir de Bretagne.”

“Là il y avait pas mal d’entrepôts. Le bleu là, ça avait été transformé en salle de concert, maintenant ça a été mis dans l’ancienne base sous-marine. Et là c’était le site du Saint-Nazaire de base, Saint-Nazaire originel en fait, qui a été entièrement détruite par l’occupant en 1942. Donc c’était là le vieux Saint-Nazaire”

“Ils avaient commencé à faire des trucs en 1997. Je me souviens qu’il y avait une espèce d’original, un mec qui croyait tout savoir, un type qui avait déjà un certain âge… je ne sais plus ce qu’il avait raconté comme ânerie… mais ils avaient commencé à faire des trous à l’intérieur. C’était en 1997. Je ne sais pas s’il avait commencé à le détruire ou pas.”

“Ce qu’il y a c’est qu’il y avait plusieurs cinémas dans le centre-ville. Les Korrigans, cinq salles, les clubs, cinq salles, plus un autre qui n’est pas loin de chez moi, une salle, donc onze salles. A la fin 2000, ils ont ouvert un multiplexe, un Cinéville. Il y a quand-même des films de qualité parce qu’ils ont un partenariat avec le cinéma Katorza à Nantes. C’est vrai que maintenant il y a douze salles, mais ce qu’il y a, c’est que c’est à côté de la base sous-marine. Si bien que le soir… le centre-ville, qui n’était déjà pas très vivant, en juin 2009, il n’avait plus de cinéma. Et les gens après le cinéma… il y avait des cafés, etc… il pouvait y avoir une vie… au moins il y avait de la lumière”

“En face du multiplexe, jusqu’en 1998-1999, il y avait une zone artisanale avec des petites entreprises. Des entreprises qui ont été déménagées en proche périphérie. Il y avait par exemple une entreprise qui vendait des pièces mécaniques, des roulements, de l’outillage, du matériel de soudure… des choses comme ça quoi. Il y avait peut-être quelques dizaines d’employés à l’intérieur. Et il y avait donc une place, et à l’intérieur il y avait l’ancienne maison des associations, qui s’appelait la maison du peuple. A la place maintenant, il y a le Ruban Bleu, qui a été plus ou moins un fiasco. Ça a complètement changé de physionomie, parce que le précédent maire voulait déplacer le centre-ville “naturel” vers le centre-ville qui existait avant la guerre, qui était vraiment proche du port. C’est pour ça que son projet s’appelait ville-port. Mais ça a été un succès mitigé, enfin à mon avis…”